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Page:Bossuet - Discours sur l’Histoire universelle, 1681.djvu/176

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par cette immense quantité d’eaux que Dieu amena sur la terre, et par le long sejour qu’elles y firent, les sucs qu’elle enfermoit furent alterez ; l’air chargé d’une humidité excessive fortifia les principes de la corruption ; et la premiere constitution de l’univers se trouvant affoiblie, la vie humaine qui se poussoit jusques à prés de mille ans se diminua peu à peu : les herbes et les fruits n’eûrent plus leur premiere force, et il fallut donner aux hommes une nourriture plus substantielle dans la chair des animaux. Ainsi devoient disparoistre et s’effacer peu à peu les restes de la premiere institution ; et la nature changée avertissoit l’homme que Dieu n’estoit plus le mesme pour luy depuis qu’il avoit esté irrité par tant de crimes.

Au reste cette longue vie des premiers hommes marquée dans les annales du peuple de Dieu, n’a pas esté inconnuë aux autres peuples, et leurs anciennes traditions en ont conservé la memoire. La mort qui s’avançoit fit sentir aux hommes une vengeance plus prompte ; et comme tous les jours ils s’enfonçoient de plus en plus dans le crime, il falloit qu’ils fussent aussi, pour ainsi parler, tous les jours plus enfoncez dans leur supplice.

Le seul changement des viandes leur pouvoit marquer combien leur estat alloit s’empirant, puis qu’en devenant plus foibles, ils devenoient