Page:Bossuet - Discours sur l’Histoire universelle, 1681.djvu/378

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Les calomnies se joignoient en vain à la cruauté. Des hommes qui pratiquoient des vertus au dessus de l’homme, estoient accusez de vices qui font horreur à la nature. On accusoit d’inceste ceux dont la chasteté faisoit les délices. On accusoit de manger leurs propres enfans, ceux qui estoient bienfaisans envers leurs persecuteurs. Mais malgré la haine publique, la force de la verité tiroit de la bouche de leurs ennemis des témoignages favorables. Chacun sçait ce qu’écrivit Pline Le Jeune à Trajan sur les bonnes moeurs des chrestiens. Ils furent justifiez, mais ils ne furent pas exemptez du dernier supplice ; car il leur falloit encore ce dernier trait pour achever en eux l’image de Jesus-Christ crucifié, et ils devoient comme luy aller à la croix avec une déclaration publique de leur innocence. L’idolatrie ne mettoit pas toute sa force dans la violence. Encore que son fonds fust une ignorance brutale et une entiere dépravation du sens humain, elle vouloit se parer de quelques raisons. Combien de fois a-t-elle tasché de se déguiser, et en combien de manieres s’est-elle transformée pour couvrir sa honte ? Elle faisoit quelquefois la respectueuse envers la divinité. Tout ce qui est divin, disoit-elle, est inconnu : il n’y a que la divinité qui se connoisse elle-mesme : ce n’est pas à nous à discourir de choses si hautes : c’est pourquoy il en faut croire les anciens, et chacun doit suivre la religion qu’il