Page:Bossuet - Discours sur l’Histoire universelle, 1681.djvu/389

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

avoit, disoient-ils, qu’un dieu souverain : mais il estoit si grand, qu’il ne se mesloit pas des petites choses. Content d’avoir fait le ciel et les astres, il n’avoit daigné mettre la main à ce bas monde qu’il avoit laissé former à ses subalternes ; et l’homme, quoy-que né pour le connoistre, parce qu’il estoit mortel, n’estoit pas une oeuvre digne de ses mains. Aussi estoit-il inaccessible à nostre nature : il estoit logé trop haut pour nous ; les esprits celestes qui nous avoient faits, nous servoient de mediateurs auprés de luy, et c’est pourquoy il les falloit adorer.

Il ne s’agit pas de réfuter ces réveries des platoniciens, qui aussi-bien tombent d’elles-mesmes. Le mystere de Jesus-Christ les détruisoit par le fondement. Ce mystere apprenoit aux hommes que Dieu qui les avoit faits à son image, n’avoit garde de les mépriser : que s’ils avoient besoin de mediateur, ce n’estoit pas à cause de leur nature que Dieu avoit faite comme il avoit fait toutes les autres ; mais à cause de leur peché dont ils estoient les seuls auteurs : au reste, que leur nature les éloignoit si peu de Dieu, que Dieu ne dédaignoit pas de s’unir à eux en se faisant homme, et leur donnoit pour mediateur, non point ces esprits celestes que les philosophes appelloient démons, et que l’ecriture appelloit anges ; mais un homme, qui joignant la force d’un dieu à nostre nature infirme, nous fist un remede de nostre foiblesse.