Page:Bossuet - Discours sur l’Histoire universelle, 1681.djvu/442

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vous y aurez pû observer le génie des peuples et celuy des grands hommes qui les ont conduits. Les évenemens qui ont porté coup dans la suite ont esté montrez ; et afin de vous tenir attentif à l’enchaisnement des grandes affaires du monde que je voulois principalement vous faire entendre, j’ay omis beaucoup de faits particuliers dont les suites n’ont pas esté si considerables. Mais parce qu’en nous attachant à la suite, nous avons passé trop viste sur beaucoup de choses pour pouvoir faire les réflexions qu’elles meritoient, vous devez maintenant vous y attacher avec une attention plus particuliere, et accoustumer vostre esprit à rechercher les effets dans leurs causes les plus éloignées. Par là, monseigneur, vous apprendrez ce qu’il est si necessaire que vous sçachiez ; qu’encore qu’à ne regarder que les rencontres particulieres, la fortune semble seule décider de l’établissement et de la ruine des empires, à tout prendre il en arrive à peu prés comme dans le jeu, où le plus habile l’emporte à la longue. En effet, dans ce jeu sanglant où les peuples ont disputé de l’empire et de la puissance, qui a préveû de plus loin, qui s’est le plus appliqué, qui a duré le plus long-temps dans les grands travaux, et enfin qui a sceû le mieux ou pousser ou se mênager suivant la rencontre, à la fin a eû l’avantage, et a fait servir la fortune mesme à ses desseins.