Page:Bossuet - Discours sur l’Histoire universelle, 1681.djvu/449

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sentences. Un des plus beaux artifices des egyptiens pour conserver leurs anciennes maximes, estoit de les revestir de certaines céremonies qui les imprimoient dans les esprits. Ces céremonies s’observoient avec réflexion ; et l’humeur serieuse des egyptiens ne permettoit pas qu’elles tournassent en simples formules. Ceux qui n’avoient point d’affaires, et dont la vie estoit innocente, pouvoient éviter l’examen de ce severe tribunal. Mais il y avoit en Egypte une espece de jugement tout-à-fait extraordinaire, dont personne n’échapoit. C’est une consolation en mourant de laisser son nom en estime parmi les hommes, et de tous les biens humains c’est le seul que la mort ne nous peut ravir. Mais il n’estoit pas permis en Egypte de loûër indifferemment tous les morts : il falloit avoir cét honneur par un jugement public. Aussitost qu’un homme estoit mort, on l’amenoit en jugement. L’accusateur public estoit écouté. S’il prouvoit que la conduite du mort eust esté mauvaise, on en condamnoit la memoire, et il estoit privé de la sepulture. Le peuple admiroit le pouvoir des loix, qui s’étendoit jusqu’apres la mort, et chacun touché de l’exemple craignoit de deshonorer sa memoire et sa famille. Que si le mort n’estoit convaincu d’aucune faute, on l’ensevelissoit honorablement : on faisoit son panegyrique, mais sans y rien mesler de sa naissance. Toute l’Egypte estoit noble, et d’ailleurs on n’y goustoit