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Page:Bossuet - Discours sur l’Histoire universelle, 1681.djvu/534

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qu’ils faisoient mourir inhumainement, aprés les avoir menez en triomphe chargez de fers, et traisnez à des chariots comme des esclaves. Mais s’ils estoient cruels et injustes pour conquerir, ils gouvernoient avec équité les nations subjuguées. Ils taschoient de faire gouster leur gouvernement aux peuples soumis, et croyoient que c’estoit le meilleur moyen de s’asseûrer leurs conquestes. Le senat tenoit en bride les gouverneurs, et faisoit justice aux peuples. Cette compagnie estoit regardée comme l’asile des oppressez : aussi les concussions et les violences ne furent-elles connuës parmi les romains que dans les derniers temps de la république, et la retenuë de leurs magistrats estoit l’admiration de toute la terre.

Ce n’estoit donc pas de ces conquerans brutaux et avares qui ne respirent que le pillage, ou qui établissent leur domination sur la ruine des païs vaincus. Les romains rendoient meilleurs tous ceux qu’ils prenoient en y faisant fleurir la justice, l’agriculture, le commerce, les arts mesme et les sciences, aprés qu’ils les eûrent une fois goustées.

C’est ce qui leur a donné l’empire le plus florissant, et le mieux établi aussi-bien que le plus étendu qui fut jamais. Depuis l’Euphrate et le Tanaïs jusqu’aux colonnes d’Hercule et la mer Atlantique, toutes les terres et toutes les mers leur obéïssoient : du milieu et comme du