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Page:Botrel - Le Mystere de Keravel.djvu/26

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François, retirant le couteau de la miche. — Un fameux outil, en effet, regardez, Monsieur Jean !

Jean. — Oui, et bien en mains ! (Il le dépose négligemment sur la table, entre lui et François.)

François, au chemineau. — Eh bien ! camarade, si tu es plutôt rouge, touche là ! Nous sommes du même côté de la barricade et nous pensons de même.

Pierre-qui-roule. — Oh ! ben, si vous pensez comme moi, vous ne vous fatiguez pas beaucoup la tête !

Jean. — À quoi penses-tu donc ?

Pierre-qui-roule. — À rien ! La politique, c’est des blagues. C’est les malins qui en profitent et les pauvres bougres qui trinquent ! C’est connu.

François. — N’empêche que, moi, je suis rouge !

Jean. — Allons donc ! vous exagérez ; vous êtes bleu, François, aussi bleu que moi, au fond.

Robert, riant. — Et moi, je suis resté blanc. Serrons donc les rangs, mes amis, et, à nous trois, nous serons tricolores : Voilà tout ce que la Patrie demande !

Yves. — Tu sais, papa, la politique, ça a l’air moins drôle que les chansons. Si on chantait encore ?

Robert. — Laisse notre hôte manger en paix. Mais toi, vieux Jacques, que nous conteras-tu ? Quelle belle histoire vas-tu nous sortir du fin fond de ton sac ?

Jacques. — Ah ! dame, j’ sais point, not’maître ; la légende de la Voix du Mort, si vous voulez ; la légende de Kéravel.

François. — Ah ! nous avons une légende ici ?

Jacques. — Oui, Monsieur l’Intendant, c’est les vieux du pays qui la racontent aux veillées d’hiver.

Robert. — Vas-y donc de ta légende, puisque Monsieur François l’ignore encore !

Jacques. — Eh ben ! la v’là : Vous savez que ce manoir appartenait jadis, aut’fois, à Robert de Kéravel, le coureux d’ mer, le grand corsaire, rival de Surcouf et de