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Feuilleton du COURRIER DE SION
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L’escalier, à une profondeur d’une dizaine de mètres, donnait accès à un vaste couloir. Les deux jeunes gens s’engagèrent dans des souterrains. Ils suivirent ainsi une longue galerie où débouchaient des couloirs plus étroits.

— Revoyons le manuscrit, dit Legay. Qu’y lisons-nous ? « La galerie à gauche après avoir franchi la porte de fer ». Il faut donc trouver cette fameuse porte. Où est-elle — Cherchons. Bigre ! Il fait froid dans ces entrailles de la terre ! Quelle atmosphère méphitique ! Regarde donc, mon vieux Sauvage, l’eau coule le long de ces parois. Comme c’est beau ! comme c’est grand ! comme c’est vaste ! On s’y perdrait. Ah ! Enfin, voici, selon toute vraisemblance, la fameuse porte de fer dont parle le manuscrit.

Une grille aux énormes barreaux de fer rouillé barrait, en effet, le couloir.

Legay voulut l’ouvrir, mais elle résista à ses efforts. Il aperçut une formidable serrure dans laquelle il essaya de faire tourner son passe-partout et sa pince-monseigneur ; mais tous ses efforts furent vains. La grille résistait.

— A-t-on idée, maugréa Legay, de fabriquer des serrures semblables ! C’est d’un autre âge ; il est vrai que ç’a été fabriqué en un temps où l’on n’avait pas encore inventé les pinces-monseigneur. C’est anachronique et embêtant.

— Hum ! Hum ! faisait Sauvage, très embarrassé en essayant d’ébranler la formidable grille.

— M’est avis, gronda Legay, que nous ne parviendrons à nous frayer un passage qu’en limant ces barres de fer. Ça nous demandera malheureusement du temps. Mais qu’y faire ? C’est le seul moyen.

Il tira de sa poche deux limes et en tendit une à son compagnon. Tous deux attaquèrent un barreau.

Ils travaillèrent ainsi pendant près d’un quart d’heure. C’était un grincement lugubre que celui des limes dans le silence mortel des souterrains.

Soudain, Legay leva l’oreille :

— Chut ! dit-il à son ami. N’as-tu rien entendu ?

— Oui, un bruit de pas étouffé.

— Nous aurait-on épiés et suivis ?

— Attendons ! silence !

Tous deux prêtèrent l’oreille.

Par moments, ils entendaient dans le silence un frôlement, un glissement léger, puis le silence se rétablissait.

Tout à coup, ils aperçurent devant eux, derrière la grille, tout au fond de la galerie ténébreuse dont le passage leur était interdit, une vague lumière tremblotante.

— Qu’est-ce cela ? balbutia Legay.

— Attendons, le bruit se rapproche dirait-on.

— Oui.

La lumière pâle avançait dans la direction des deux amis. Bientôt ils distinguèrent une lanterne sourde qui, par instants, jetait des clartés plus vives. Puis une grande forme noire apparut indistinctement, suivie d’une autre forme. Et ces deux apparitions s’approchaient avec un grincement sourd.

Legay remit en poche sa lampe électrique et, caché dans l’ombre, il attendit en recommandant à Sauvage de garder le plus profond silence.

Bientôt la mystérieuse forme noire apparut : c’était une haute silhouette humaine toute recouverte d’un manteau qui avait l’aspect d’un suaire noir ou d’une large cagoule dont le capuchon cachait entièrement le visage.

Derrière cet étrange personnage s’avançait une apparition plus étrange encore : c’était un corps de femme sans tête !