Aller au contenu

Page:Bouasse - Bases physiques de la musique.djvu/102

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
97
OBTENTION DES SONS. TOLÉRANCE DE L’OREILLE.

divisées par deux ; 2o qu’il s’agit de l’octave qui commence à la corde à vide ; plus on descend vers le chevalet, plus la corde est courte et plus les positions des doigts se rapprochent pour le même intervalle.


61. Intervalles effectivement donnés par un instrument à sons variables. — Tout le monde est d’accord pour reconnaître qu’un musicien exercé utilisant un instrument à sons variables capable de donner des accords, et deux musiciens exercés faisant un accord, émettent l’accord naturel, celui qui est défini par les harmoniques.

Le débat ne commence que pour les intervalles dont les sons constituants sont émis l’un après l’autre, intervalles que pour abréger nous appellerons mélodiques. Nous considérons comme théoriquement inadmissible l’opinion défendue en France par Cornu et Mercadier, que les intervalles mélodiques sont les intervalles pythagoriciens. Les résultats expérimentaux de ces physiciens[1] prouvent

  1. J’ai discuté leurs Mémoires au cours d’un article paru dans la Revue générale des Sciences (mars, 1906) auquel je renvoie le lecteur. L’opinion de ces auteurs est radicalement inconciliable avec la théorie ici développée, qui est soutenue par un respectable faisceau de preuves. M. Mercadier a promis une réponse à rnes critiques. Je ne peux qu’applaudir pourvu que le débat ne s’égare pas. En particulier il ne faut pas que la thèse de MM. Cornu et Mercadier, suprématie mélodique de la gamme de Pythagore, se confonde avec la thèse quasiment opposée, non existence d’une gamme mélodique privilégiée, indétermination des intervalles mélodiques. Celle-ci est, à quelques égards, aisément défendable. Par exemple, il est certain que les notes essentiellement mélodiques des traités d’harmonie (notes de passage, ornements, broderies, trilles,…) sont, par essence, indéterminées. Quand, pour orner un mi, on chante mi, ♯, mi, fa, mi, rien ne s’oppose à ce qu’on rapproche presque indéfiniment le ♯ et le fa du mi qu’on veut orner. Le trille peut se faire avec un intervalle arbitraire, et les chanteurs usent de la permission sans se gêner. À la limite n’avons-nous pas le glissé des instruments à corde qui remplit un intervalle par une succession continue de sons. Il est certain du reste que le si de la gamme d’ut majeur n’a pas la même hauteur en montant qu’en descendant, attiré qu’il est par sa résolution dans la gamme montante. Ces faits ne sont ni contestables ni contestés, sauf précisément par MM. Cornu et Mercadier qui veulent que ces notes appartiennent à la gamme de Pythagore. Si leur thèse n’a pas ce sens, je ne sais plus ce qu’elle signifie. Or, la théorie d’Helmholtz apprend les raisons qu’il y a de préférer certains intervalles, de choisir une certaine gamme ; elle laisse arbitraire un choix différent quand les raisons qu’elle invoque n’interviennent pas ; ce qui est le cas dans les exemples cités.