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comme premier point réel la croisée des fils réticulaires ; mais où se trouve le second point ?

Picard explique qu’il est constitué par le centre de l’objectif.

Mais toute explication était inutile, puisque, en définitive, dans la mesure des angles, on ne fait qu’appliquer le principe que les mêmes causes produisent les mêmes effets. Puisque successivement on amène les images de deux points Α et B au même endroit de l’appareil, il faut conclure que dans les deux opérations l’appareil, quelle que soit sa constitution, se trouve placé de même par rapport aux points Α et B ; par suite, l’angle dont il a tourné entre les deux pointés est précisément l’angle que font les directions définies par les points éloignés Α et B.

Picard remarque avec raison qu’il importe peu que le verre objectif ne soit pas bien centré sur le tube ; il distingue ainsi nettement l’axe optique de la lunette (définie par le centre optique du verre et les cheveux de son réticule) de l’axe optique du verre défini par les centres des surfaces sphériques qui le limitent.

La lunette de Picard était bien rudimentaire.

Elle se composait de deux lentilles (ni les objectifs achromatiques ni les oculaires à deux verres n’étaient inventés) disposées aux bouts d’un tuyau de fer-blanc. Sa longueur était d’un mètre environ. L’ouverture des lentilles était de 4 cm., à peu près le diamètre des verres ronds de besicles. C’était, comme on le voit, bien primitif.

Avec cet instrument Picard mesura les triangles de son canevas géodésique. Il trouva pour le rayon terrestre :

3 269 mille toises = 6 371 kilomètres


au lieu de 6 377. Comme on le voit, ce n’est pas trop mal.

Que cette histoire serve de leçon pour ceux qui ne sauraient faire la moindre expérience sans tous les perfectionnements modernes. Ce qui était bon pour Picard leur semble méprisable. Mauvais ouvriers qui se plaignent toujours de leurs outils ! Deux verres de quelques sous, du fer-blanc et un cheveu, voilà de quoi faire une lunette qui, si l’on est habile, donne le rayon terrestre au millième près !

87 bis. Viseurs pour armes de chasse ou de guerre.

Malgré que ces viseurs soient longuement recommandés dans le Catalogue d’armes de Saint-Étienne, il semble que personne en France ne se doutait, avant la guerre, que le procédé ordinaire de visée pour les fusils est grossièrement primitif. Aligner avec précision trois points qui sont de l’œil à des distances aussi différentes que 40 cm., 90 cm. et l’infini, est un problème que je considère comme insoluble, pour habitué que je sois à régler des appareils.

Tout le monde aurait pu savoir (les Allemands, eux, ne l’ignoraient pas) qu’on monte aisément sur un fusil un petit viseur qui permet, l’arme appuyée, de toucher le but sans difficulté avec la précision d’un astronome visant une étoile.