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Page:Bouasse - Optique géométrique élémentaire, Focométrie, Optométrie, 1917.djvu/44

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nette de même grandeur (couvrant le même nombre de traits) correspond à un objet situé à la même distance et de même grandeur que celui qui sert à l’étalonnage.

11. Parallaxe.

L’expérience vulgaire permet de vérifier tout ce qui précède. Elle nous amène à définir un mot qui revient à chaque instant en Physique et en Astronomie, la parallaxe. Le mot parallaxe (différence, changement) représente la variation dans les positions relatives apparentes des objets du fait que l’observateur se déplace. On vérifie immédiatement que deux objets A et B se déplacent le plus, relativement l’un à l’autre et toutes choses égales d’ailleurs, s’ils sont dans un plan passant par l’œil O ; le moins si B est dans le plan normal à la droite OA. Revenons au premier cas : le changement apparent est d’autant plus grand que la distance AB est plus grande ; il s’annule quand cette distance s’annule.

La vision binoculaire nous fournit des aspects différents du même objet ; cette différence, cette parallaxe, produite par l’existence simultanée de deux observateurs (les deux yeux), permet de reconnaître la distance des objets sans déplacement de la tête. Dire qu’un objet change de forme, c’est dire que les points qui le constituent changent de distances relatives apparentes : nous restons bien dans les effets de parallaxe.

Ceci posé, regardons la maison d’en face à travers une vitre, en allumant une lampe dans la chambre. Nous voyons simultanément la maison d’en face à travers la vitre, la lampe par réflexion sur la vitre. Il suffit de déplacer la tête pour vérifier que les deux objets ne sont pas à la même distance. La parallaxe nous fournit un renseignement sûr : l’image virtuelle de la lampe, jouant le rôle d’objet réel, est plus proche de nous que la maison d’en face. Je suppose qu’on habite un appartement à Paris ; car en province il peut encore arriver que la chambre soit plus profonde que la rue n’est large.

Nos pères, qui n’avaient pas le cinéma et étaient faciles à contenter, montraient des spectres au théâtre en plaçant vers le milieu de la scène une glace sans tain, légèrement inclinée vers les spectateurs. Elle réfléchissait un figurant placé contre l’orchestre plus bas que la scène convenablement trouée : on l’éclairait avec un nombre suffisant de quinquets.

La Mort apparaissait en image virtuelle. Macabre phénomène ! les acteurs, vus par transparence à travers la glace, pouvaient traverser la Mort sans qu’elle résistât le moins du monde !

Mais voici où je veux en venir : le spectateur savait parfaitement quand l’acteur passait devant ou derrière la Mort, ou (chose épouvantable) la traversait sans plus de façon. C’est donc que l’image, pour virtuelle qu’elle fût, avait dans l’espace une position bien déterminée qu’on reconnaissait avec autant de facilité que celle d’un objet réel.