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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/115

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Quand le chef revint à la lisière du bois, il était près de quatre heures de l’après-midi. Les canots des Hurons, s’avançant rapidement vers la petite anse où les Algonquins se tenaient cachés, grandissaient à vue d’œil. Ils n’étaient plus, maintenant, qu’à une faible distance du guet-àpens qui les attendait.

Cependant, sur la rive, tout paraissait calme et paisible. La température était radieuse. Une légère brise agitait faiblement la surface du lac et remuait à peine les feuilles des arbres. Rien n’indiquait que derrière le riant rideau de verdure qui entourait la petite baie, se cachait une bande de démons assoiffés de sang.

Les premiers canots des Hurons touchèrent terre. Ceux qui suivaient vinrent aborder de chaque côté des premiers, et ainsi de suite, allongeant la ligne des canots échoués sur presque tout le pourtour de la baie. Environ la moitié des canots accostèrent de cette manière, et leurs occupants mirent pied à terre.

Mais au moment où les canots qui n’avaient pas encore pu aborder s’approchaient et cherchaient, entre ceux déjà échoués sur le sable, les espaces nécessaires pour pouvoir s’échouer à leur tour, créant ainsi une certaine confusion, un cri, ou plutôt, un effroyable hurlement retentit et alla réveiller les échos endormis, jusqu’à une grande distance sur le lac et dans la forêt. Ce cri sinistre fut aussitôt repris par deux cents gosiers féroces, et les trois bandes d’Algonquins, sortant de la forêt par trois points différents, s’élancèrent sur le sable de la grève qu’ils traversèrent en quelques bonds rapides et se précipitèrent sur ceux qui étaient en train d’atterrir ; frappant, blessant, tuant et hurlant continuellement comme des forcenés.