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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/128

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année est encore accrochée aux coudriers. Mais, en revanche, je t’amène un pensionnaire.

— Un pensionnaire ?

— Oui ! Approche et regarde !

Maître Boire, qui s’était arrêté sur le talus de la berge, sauta sur le sable de la grève, s’approcha du canot et vit, étendu sur le fond et pâle comme un mort, Roger qui, bien qu’ayant repris connaissance était trop faible pour parler ou faire un mouvement.

— Ce pensionnaire là n’est pas pour moi, fit-il. Et, indiquant l’église toute proche, il ajouta :

Le cimetière est par là !

— Il n’est pas mort, dit Le Suisse d’un ton scandalisé. Il n’est qu’affaibli par la perte de sang. Ses blessures, tout en étant sérieuses, ne mettent pas ses jours en danger.

— Et c’est là le pensionnaire que vous m’amenez ?… Je ne vous remercie pas !

En ce moment, la femme de l’aubergiste, qui s’était approchée pendant que les hommes discutaient, regarda au fond du canot et s’exclama :

— Mon doux Jésus, le gentil chérubin !… Et tout jeune !… Où et comment a-t-il été blessé comme cela ? questionna-t-elle, en s’adressant aux deux, voyageurs à la fois.

— Nous l’avons trouvé sur la grève, à courte distance de l’extrémité de l’île, répondit Le Suisse. Une bataille en règle a dû avoir lieu en cet endroit, et pas plus tard qu’hier, car nous y avons vu les cadavres d’une trentaine de sauvages, tous scalpés, et, un peu à l’écart des cadavres sauvages, ce jeune homme dans l’état où vous le voyez.