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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/140

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Pendant ce discours, le visage d’Ohquouéouée avait paru s’attrister. À la fin, sa tête s’inclina sur sa poitrine et son regard se porta vers la terre, où il resta fixé.

Roger répondit :

— Je crois que tu as raison, Suisse, et que nous ne pourrions faire mieux que de suivre le programme que tu viens de nous tracer.

Les deux hommes causèrent encore quelques instants, puis Le Suisse se leva et s’enfonça dans le bois, en prenant la direction de la source Saint-Léon.

Roger le regarda s’éloigner et, quand il eut disparu, caché par les arbres, il se tourna vers Ohquouéouée en disant :

— Il ne faut pas en vouloir à Le Suisse de son air bourru et de ses manières rudes, car, au fond, c’est un excellent cœur. Sans lui, je serais certainement mort au fond des bois de l’autre côté de Ville-Marie.

— Quand je l’ai vu pour la première fois, il m’a fait peur, mais je commence à m’habituer à ses manières. Si je restais assez longtemps avec vous deux, j’arriverais peut-être à l’aimer…

L’Iroquoise avait dit ces quelques mots d’une voix qui, malgré qu’il fût tout près de son interlocutrice, avait paru très basse au jeune homme. Mais celui-ci avait déjà remarqué que, même quand il en était plus éloigné et malgré qu’elle n’élevât jamais la voix, il l’entendait tout aussi distinctement. On eût dit que la voix de cette Indienne, qui tout en étant très douce n’en était pas moins résonnante,