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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/157

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sur une dizaine de pas vers le milieu de la rivière qui, juste au-dessous de cet endroit, s’arrondissait en un remous dont la berge était formée de cette espèce particulière d’argile que les gens de la campagne appellent de la glaise bleue. Prenant de cette argile, Le Suisse la détrempa avec de l’eau de la rivière, la pétrit avec soin et en fit une pâte à peu près de la consistance de la glaise à modeler prête à être employée.

Ensuite prenant une à une les perdrix que Roger achevait de lui préparer, il se mit à les entourer de ce mortier ; faisant de chacune une boule dont le centre était occupé par la perdrix. Quand il les eut toutes arrangées ainsi, chaque perdrix formant, avec la glaise qui l’entourait, une boule d’environ un pied de diamètre, il prit la bêche, qui, maintenant, allait lui servir de tisonnier, vida le trou des braises qu’il contenait, plaça au fond les six perdrix, les recouvrit d’un bon pied de gravier rougi au feu sur lequel il remit les braises et, par dessus le tout, entassa le bois que Roger apportait justement.

Aussitôt, le bois prit feu et se mit à flamber. Le Suisse attendit que Roger fût revenu avec une deuxième brassée de bois, qu’il entassa par-dessus la première, puis il dit :

— Nous pouvons maintenant nous coucher et dormir tranquilles pendant deux ou trois heures ; quand nous nous éveillerons, le souper sera prêt.

Ils s’arrangèrent chacun un lit de mousse et de feuilles, et ils s’endormirent aussi confortablement qu’auraient pu le faire, dans leur lit de duvet, les bourgeois les plus fastidieux.

Quand ils s’éveillèrent, le soleil allait se coucher. De leur feu, qui flambait avec rage quand ils s’étaient