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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/16

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carrure, avait le visage d’un très jeune homme, presque d’un adolescent ; il paraissait à peine âgé de vingt ans.

Son visage aux traits réguliers, au teint clair et rose comme celui d’une jeune fille, son nez bien droit, surmontant une bouche aux lèvres ni trop minces, ni trop pleines : une de ces bouches qui peuvent, ou sourire de la manière la plus gracieuse, ou prendre l’empreinte de la plus profonde tristesse, ses grands yeux d’un bleu tirant sur le vert et son large front, à demi caché par une abondante chevelure de couleur châtain et naturellement bouclée, lui composaient une physionomie qui, du premier coup d’œil, inspirait la confiance et attirait la sympathie. Sa lèvre supérieure et ses mâchoires s’ombrageaient d’un fin duvet qui ne faisait que commencer à brunir.

Il était vêtu d’une chemise de grosse toile, de cette toile que les femmes canadiennes commençaient justement alors à tisser sur leurs métiers. Cette chemise rejoignait, à la ceinture, une culotte de peau qui n’avait plus de couleur, ou plutôt, chez laquelle toutes les couleurs se confondaient en un brun terne, et qui était rendue luisante par un long usage. Le bas de ses jambes était protégé par des jambières de toile à voile, dont les extrémités inférieures s’enfouissaient dans des mocassins à peu près semblables à ceux que chaussait la jeune Indienne. Sa tête était couverte d’un bonnet de fourrure, mais de fourrure au poil tellement usé qu’il eût été à peu près impossible de dire de quel animal elle provenait.

Il paraissait en ce moment très en colère, et tout en marchant vers la jeune fille, il enfonça d’un coup de poing son bonnet de fourrure plus avant sur sa