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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/164

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À chaque détour de la rivière, ils découvraient une merveilleuse perspective d’eau limpide et à la surface polie comme un miroir, s’étendant entre deux bordures de feuillage allant du vert tendre au vert foncé. Chacune de ces nappes d’eau tranquille apparaissait aux regards charmés des deux voyageurs comme une glace immense encadrée de verdure.

De leurs bras vigoureux, nos deux compagnons manièrent l’aviron toute la journée, n’arrêtant, vers midi, que juste le temps de dévorer chacun une perdrix. Ils n’atterrirent pour la nuit qu’environ une demi-heure avant le coucher du soleil. Ils auraient bien remonté la rivière plus haut avant de prendre terre, mais ils étaient arrivés au pied d’un courant beaucoup trop rapide pour qu’ils entreprissent de le remonter dans leur canot.

Des voyageurs qui feraient le même trajet de nos jours rencontreraient, dans les huit ou neuf lieues que Le Suisse et Roger avaient parcourues depuis le matin, plusieurs de ces courants trop rapides pour être remontés en canot.

Mais, à cette époque, tout le bassin de la rivière Saint-François était encore couvert d’épaisses forêts ; ce qui retardait l’écoulement des eaux provenant de la fonte des neiges et maintenait, tout l’été, le niveau de l’eau à la même hauteur qu’il est maintenant à la fin d’avril. De sorte que nos voyageurs avaient pu avancer toute la journée sans quitter leur embarcation.

Mais le rapide qui venait de les forcer à atterrir était beaucoup trop long et, surtout, beaucoup trop accidenté pour qu’ils essayassent de le remonter autrement qu’en transportant leur canot, aussi bien