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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/170

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onduleux comme la surface de l’océan à l’approche de la tempête. Peu à peu, ces ondulations étaient devenues des collines, les collines s’étaient élevées graduellement et, sept ou huit lieues en aval de l’endroit où il reçoit les eaux de la rivière Magog, les deux compagnons avaient vu le Saint-François couler au fond d’une vallée étroite et profonde, qui allait toujours en se rétrécissant à mesure qu’ils en remontaient le cours, jusqu’à une demi-lieue environ de ce dernier endroit, alors que les flancs des collines s’allongeaient jusque sur les bords de la rivière.

Environ une lieue plus haut, juste au moment où il reçoit les eaux de la Massawippi, le Saint-François dévie brusquement à gauche, faisant paraître l’affluent comme la continuation de la rivière maîtresse ; et n’eût été de Le Suisse, Roger ne se fut pas aperçu qu’ils avaient laissé le Saint-François. Il s’en serait aperçu peu après cependant, car, une petite lieue plus loin, il vit la Massawippi, diminuée déjà du volume d’un petit cours d’eau — la rivière au Saumon — se diviser en deux branches, dont la plus petite, celle de gauche dans laquelle ils s’engagèrent, était la rivière Coaticook, que Le Suisse appelait, de son nom iroquois : « Kkwaktakwak, » ou, comme il le prononçait : « Couactacouac. » Ce n’était plus qu’un petit cours d’eau de dixième ordre.

À cette époque, toute la partie du pays arrosée par le Saint-François et ceux de ses tributaires que nous venons de nommer, était couverte de forêts. Dans les vallées, croissaient les diverses espèces de pins : épinettes, blanches et noires, sapins, pins blancs et autres. Mais, sur les croupes des collines séparant les vallées au fond desquelles coulaient les nombreux