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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/203

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reille et, après avoir écouté l’espace d’une couple de secondes, dit :

— Voilà l’écureuil qui s’en vient !

En effet, un coup de sifflet aigu et saccadé, le même que Roger avait entendu le premier matin qu’il avait épié les écureuils, venait de se faire entendre dans les profondeurs de la forêt. Ce cri venait de très loin, si loin, que les deux hommes l’avaient à peine entendu. Mais, aussitôt, il se fit entendre de nouveau et, cette fois, beaucoup plus rapproché. En moins de deux minutes, l’écureuil, la queue en panache et le poil hérissé, bondissant de branche en branche et faisant continuellement entendre son cri provocateur et comme rempli d’imprécations, d’un dernier bond, vint retomber sur une des plus basses branches de l’orme où, dans sa rage impuissante, il se mit à déchirer l’écorce de ses griffes et de ses dents.

Quel instinct l’avait averti qu’un danger menaçait sa demeure ? Comment avait-il pu reconnaître que les coups de hache, qu’il n’avait dû entendre que très faiblement, car il devait être à un bon mille de distance quand Roger avait frappé l’arbre de sa hache pour la première fois, s’attaquaient à l’arbre à l’intérieur duquel il avait emmagasiné sa provision d’hiver ? Pour le savoir, il faudrait comprendre le pourquoi de tout ce que les animaux font que nous ne pouvons expliquer et, surtout, savoir comment les animaux se comprennent entre eux.

Roger, à l’arrivée de l’écureuil, avait posé sa hache à terre et, des yeux avait suivi les mouvements de celui qu’il était en train de dépouiller de son bien. Quand il le vit, sur la plus basse branche de l’orme, déchirer l’écorce de rage et donner les signes du plus