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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/213

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XXXI

LA MORT D’UN CHEF IROQUOIS

Ohquouéouée n’eut pas de peine à traverser la cohue des femmes, des enfants et des jeunes chasseurs massés à la porte de la cabane du conseil ; car, à son approche, chacun se reculait avec respect et compassion pour lui livrer passage.

En pénétrant à l’intérieur de la cabane, la jeune fille ne put d’abord rien distinguer : la nuit était maintenant presque complète et la cabane ne possédait aucun moyen d’éclairage artificiel. Peu à peu cependant, ses yeux s’habituèrent à l’obscurité, et elle distingua confusément son père assis sur des peaux de bêtes, le dos appuyé contre une sorte de dossier fait de branches entrelacées et recouvertes de fourrures.

Le vieil Indien était triste à voir : dans la position assise, les jambes repliées sous lui, le tronc supporté et maintenu droit par cet échafaudage couvert de peaux, la tête pendante sur une épaule, et dans un état de demi-somnolence.

D’un air navré, Ohquouéouée contempla son père pendant quelques instants ; puis elle se laissa tomber sur les genoux, aux pieds du vieillard. Peu à peu, son corps s’affaissant, elle s’écroula assise sur ses talons et, défaisant ses tresses et ramenant sa longue et épaisse chevelure sur son visage, elle resta là, muette et immobile, semblable à la statue de la douleur.

De la foule restée à l’extérieur, on n’entendait, de temps en temps, que quelques chuchotements causés,