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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/218

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vieux chef était à l’agonie. Soudain, il s’affaissa sur lui-même, roula et s’étendit sur sa couche de peaux, râla encore deux ou trois fois puis devint immobile.

Cayendenongue, le chef respecté de tous, était parti pour la Grande Chasse !

Cela s’était fait si vite, qu’Ohquouéouée, saisie d’effroi, n’avait pu faire un mouvement pour soutenir son père. Elle resta quelques instants sans bouger, comme glacée d’horreur ; puis elle se releva, sortit à la porte de la cabane, reprit là sa position écrasée, se recouvrit le visage de ses cheveux et, se balançant le corps d’un côté et de l’autre, elle entonna un chant plaintif et lugubre, dans lequel elle racontait les prouesses et célébrait les vertus de son père.

À cette vue, toutes les autres femmes de la tribu, qui, sachant que le malade ne passerait pas la nuit, étaient restées aux abords de la cabane du conseil, se mirent à parcourir les sentiers qui serpentaient entre les cabanes du village, en poussant des lamentations, déchirant leurs vêtements et s’arrachant les cheveux.

Ces lamentations durèrent tout le reste de la nuit et toute la matinée qui suivirent la mort du chef. Quand le jour vint, les jeunes gens allèrent à quelque distance dans la forêt et y érigèrent une plate-forme, élevée d’une dizaine de pieds au-dessus du sol. Cette plate-forme était formée des troncs de six jeunes arbres, plantés en terre et servant de piliers, qui supportaient des traverses, faites aussi de troncs d’arbres et attachées aux piliers avec des liens d’écorce. Sur ces traverses, ils avaient étendu des peaux d’ours, qu’ils avaient assujetties avec des liens de nerfs et qui formaient le plancher de la plate-forme.

Puis les jeunes gens étaient revenus au village.