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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/236

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dans le tronc d’un arbre, après avoir passé à quelques pouces seulement de la tête de Le Suisse.

Les deux hommes firent volte-face, se jetèrent sur les mains et les genoux et rampèrent hâtivement jusque derrière les racines soulevées d’un gros pin ; pendant que le lugubre et retentissant cri de guerre des sauvages déchirait le silence de la forêt, et qu’une trentaine de Peaux-Rouges, hurlant, gambadant et brandissant leurs armes, se précipitaient sur eux à travers les broussailles dont le sous-bois était formé.

Les plus avancés des guerriers sauvages n’étaient pas à plus d’une trentaine de pieds des deux Blancs. Ceux-ci, sans prendre le temps de réfléchir, épaulèrent leurs fusils et tirèrent, les deux détonations n’en faisant qu’une.

En recevant cette décharge, trois sauvages culbutèrent et restèrent étendus parmi les feuilles mortes. Mais, avant que les deux amis eussent eu le temps de recharger leurs armes, le reste de la bande était sur eux. Ils se relevèrent donc et, empoignant leurs fusils par le canon et s’en servant comme de massues, ils franchirent l’espèce de rempart formé par les racines derrière lesquelles ils s’étaient abrités, et ils se mirent à frapper dans le tas de leurs assaillants comme des hommes qui, sachant qu’ils n’ont pas de quartiers à attendre de leurs ennemis, sont décidés de vendre leur vie aussi chèrement que possible.

La première fois que Le Suisse rabattit ainsi son fusil dans le tas des sauvages, il enfonça un crâne et brisa une épaule ; mais son fusil se rompit, et il ne resta qu’avec un tronçon du canon dans les mains. Gardant ce tronçon dans sa main droite et prenant