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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/267

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être très lourd, était resté à l’autre extrémité de l’embarcation ; car l’impression que la quille avait laissée dans le sable formait, avec la surface de l’eau, un angle d’une vingtaine de degrés.

Alors Ohquouéouée comprit ce que tout cela signifiait :

Les deux Blancs qu’elle cherchait — car ce ne pouvait être qu’eux : les empreintes étroites des pieds étaient de Roger qui, comme pendant la traversée du lac Saint-Pierre, se tenait toujours à l’avant du canot, pendant que c’était la pesanteur de Le Suisse qui, quand Roger était débarqué, avait, en enfonçant l’arrière dans l’eau fait relever l’avant du canot et lui avait donné cette inclinaison que l’empreinte dans le sable indiquait si clairement — s’étaient arrêtés un moment ici pour cueillir de ces cenelles que les premières gelées avaient attendries et adoucies.

« Ainsi, c’était le long de cette rivière que le jeune guerrier blanc et son compagnon avaient passé l’automne ! Mais ils étaient partis et descendaient la rivière en la précédant !… Pourrait-elle les rejoindre ? Oui ! Elle le pourrait ; car, à en juger par la fraîcheur des empreintes aussi bien que par la blancheur du bois exposé à chacune des branches coupées, les deux Blancs ne venaient que de quitter cet endroit quand elle y était arrivée. Et, dans ce cas, ils ne pouvaient avoir que très peu d’avance sur elle. Il ne restait plus qu’environ une couple d’heures de jour et les ténèbres allaient bientôt les obliger de s’arrêter pour la nuit ! En se hâtant et en marchant toute la nuit s’il le fallait, elle réussirait bien à les rejoindre avant qu’ils ne se remettent en route, au matin ! »