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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/268

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Mais un doute l’arrêta soudain :

« Si ce n’était pas ceux qu’elle cherchait qui avaient laissé ces traces de leur passage ?… Si c’étaient des étrangers, des gens qu’elle ne connaissait pas ?… Sa ligne de conduite serait alors toute tracée ! Elle s’approcherait d’eux avec précautions, pour ne pas leur donner l’éveil, puis, quand elle aurait constaté que ce n’était pas ceux qu’elle cherchait, elle continuerait sa route jusqu’à la rivière Saint-François, où elle attendrait patiemment le retour de Roger et de Le Suisse. »

Ces réflexions, l’Indienne les avait faites en moins de temps que nous n’en avons mis à les écrire. Avec une nouvelle vigueur, que lui donnait l’espoir ravivé de revoir bientôt celui que son cœur désirait tant, elle se remit en marche, longeant toujours la rive droite de la rivière Massawippi.

Elle avait repris sa marche depuis une demi-heure environ quand, soudain, une clameur retentissante vint frapper son oreille. En l’entendant, le pur sang onnontagué dont ses veines étaient remplies se mit à circuler avec une violence qui lui donnait le vertige. Ses poumons se dilatèrent et aspirèrent l’air avec force, ses lèvres s’écartèrent et sa gorge allait lancer le cri de guerre de sa nation — c’était bien ce cri qui venait de déchirer le silence de ces paisibles forêts — quand une double détonation d’armes à feu vint lui couper la respiration et la clouer sur place.

Aux premières clameurs, l’Indienne, emportée par son sang iroquois, avait fait un mouvement pour répéter le cri que les guerriers de sa tribu venaient de lancer ; car il n’y avait pas à s’y méprendre, c’était bien les guerriers de Sarastau qui venaient d’entrer