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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/269

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en conflit avec un ennemi, et qui avaient poussé le sonore cri de guerre dont l’écho avait toujours fait bouillonner le sang de la jeune fille, à chaque fois qu’elle l’avait entendu, depuis qu’elle avait l’âge de se souvenir.

Mais, avant qu’elle eût eu le temps d’élever la voix, les deux détonations étaient venues enfoncer dans son cerveau, comme avec un fer rouge, l’idée que ses compatriotes combattaient des Blancs ; et que ces Blancs ne pouvaient être d’autres que l’homme qu’elle aimait par-dessus tout, celui qu’elle cherchait à travers les forêts interminables depuis des semaines, avec son compagnon.

À cette dernière réflexion, un conflit s’éleva, dans le cœur et le cerveau de l’Indienne, entre deux sortes d’amour : l’amour de sa race et l’amour de celui que la nature désirait lui associer dans l’œuvre de la perpétuation du genre humain. Mais la lutte fut de courte durée et l’amour de sa race eut le dessous.

« Quoi ! Le jeune guerrier blanc était en danger d’être tué par des guerriers onnontagués !… des guerriers de sa tribu, à elle !… Ah ! s’ils avaient le malheur de toucher à un cheveu de sa tête, elle saurait bien le leur faire payer ! »

Cette dernière réflexion lui rendit l’usage de ses membres et, s’élançant dans la direction d’où étaient partis les coups de feu et les clameurs, la jeune fille se mit à courir à travers le sous-bois.

Mais il lui restait encore près d’un demi-mille à parcourir, et une rivière à traverser, avant d’arriver au lieu du combat ; car c’étaient bien les clameurs de la bataille entre Le Suisse et Roger d’un côté et les Iroquois de l’autre, qu’elle avait entendues. Quand