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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/289

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de le faire, mais, puisqu’elle préfère les guerriers blancs à ceux de sa race, qu’elle s’en aille avec lui au pays des Blancs, qu’elle préfère aussi aux Onnontagués, pendant que moi, Oréouaré, je ferai mon possible pour être digne de commander à la bande de braves que vous êtes !

Et Oréouaré se rassit, au milieu du plus grand silence.

Tous les regards s’étaient tournés vers Ohquouéouée qui, assise sur le sol, les jambes croisées devant elle, les mains jointes et les coudes appuyés sur les genoux, le menton appuyé sur sa poitrine et le regard fixé devant elle, réfléchissait à ce qui venait de se passer.

La nuit était déjà passablement avancée. Les ténèbres épaisses de la forêt étaient violemment déchirées en longues traînées séparées par les ombres que projetaient les arbres, causées par les reflets du brasier que les sauvages entretenaient au centre du cercle que formait le conseil. Une brise légère s’était élevée qui mêlait le mystère de ses murmures assourdis au crépitement du brasier et au clapotement des vagues minuscules du Saint-François venant mourir sur la grève.

Ohquouéouée réfléchissait et les guerriers respectaient son silence.

Bien qu’Oréouaré ne se fut basé que sur des suppositions quand il avait parlé des sentiments d’Ohquouéouée à l’égard des Blancs, il avait frappé juste.

Pendant les deux ou trois semaines que la jeune Indienne avait passées à rôder autour des Trois-Rivières, elle avait été à même d’observer, bien que de loin et en se tenant tout le temps cachée, les us et