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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/290

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coutumes des habitants de la Nouvelle-France. Elle avait pu constater la différence qui existait entre le genre de vie des Français et celui des sauvages, et elle s’était éloignée de ces environs convaincue que les femmes des Blancs étaient mieux logées, mieux vêtues, mieux nourries et, d’une manière générale, mieux traitées que les femmes de sa nation.

De plus, chez elle, le terrain était préparé pour que ces constatations produisissent tout leur effet : le missionnaire qui avait passé l’hiver dans la même bourgade algonquine que la jeune Iroquoise, tout en lui enseignant un peu de français, lui avait aussi inculqué autant des principes de la religion catholique qu’il lui avait été possible de le faire en cinq ou six mois. Ohquouéouée avait été émerveillée des beautés de cette religion, nouvelle pour elle, dont les doctrines et, surtout, les quelques cérémonies, bien simples pourtant, auxquelles elle avait pu assister chez les Algonquins, comblaient, dans son esprit, un vide qu’y avaient toujours laissé les simagrées et les contorsions des jongleurs de sa tribu.

Tous ces souvenirs et toutes ces réflexions s’étaient bousculés dans son cerveau, pendant que les orateurs onnontagués avaient parlé. Mais, maintenant que le silence glacial qui régnait depuis qu’Oréouaré s’était tu la pressait de prendre un parti et d’en informer ceux qui attendaient sa réponse, une raison semblait s’être détachée de la masse confuse qui bouillonnait dans son cerveau et planer au-dessus de sa pensée. Et cette raison, qui allait influer le plus sur la décision qu’il lui fallait prendre sans retard, était celle-ci :