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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/293

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il s’était senti entraîné vers une couche où il s’était étendu avec délices.

Mais, dans son esprit encore embrouillé, tous ces événements se confondaient les uns avec les autres et, malgré qu’il fit de violents efforts de mémoire, il ne pouvait arriver à découvrir si tout cela était bien la réalité, ou s’il n’avait pas été le jouet d’un rêve.

Peu à peu, cependant, ses idées s’éclaircirent. Il se rappela distinctement la rencontre du canot sauvage sur la rivière Massawippi, l’attaque dans le bois, leur capture par les Iroquois et les tourments que ceux-ci avaient fait subir à son malheureux compagnon avant que celui-ci, rendu furieux par la souffrance, ne se fût délivré et n’eût obligé ses bourreaux de le mettre à mort.

Alors il se dit que des tourments semblables à ceux que les Iroquois avaient infligés à Le Suisse devaient lui avoir été réservés, et il comprit qu’il ne devait d’y avoir échappé qu’à l’intervention providentielle d’Ohquouéouée.

Mais comment Ohquouéouée se trouvait-elle là ?

Continuant ses réflexions à voix haute et s’adressant à l’Indienne, il demanda :

— Comment se fait-il que, après t’avoir quittée à l’embouchure du Saint-François à la fin de juillet, je te retrouve dans cette partie du pays, au mois de novembre, et en compagnie de ces sauvages ? Et comment se fait-il que tu aies assez d’autorité sur eux pour leur faire relâcher un prisonnier, surtout un prisonnier comme moi, qui ai aidé à leur tuer ou blesser une douzaine de guerriers avant de succomber ?

Alors Ohquouéouée, lui prenant la main et le regardant avec amour, l’amour que le sacrifice