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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/304

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troublé seulement par le bruit cadencé et monotone fait par l’aviron que maniait le jeune homme en s’enfonçant dans l’eau.

Ce soir là, Roger atterrit plus à bonne heure que d’habitude. Aussitôt à terre, il se mit au travail et construisit un abri composé de trois pans et d’une toiture. Bien que formé uniquement de branches d’arbres et d’écorces, cet abri était suffisant pour les garantir du vent et de la pluie. Du côté resté ouvert, le jeune homme alluma un grand feu, qu’il entretint toute la nuit.

Avant que les ténèbres ne fussent complètes, il avait enlevé l’écorce d’un gros bouleau qui croissait non loin de là et, avec cette écorce, il confectionna, à la lueur du brasier, cinq récipients en forme de paniers, — casseaux ou cassots, comme on les appelait alors — dans lesquels il vida autant de sacs de noix. Avec la toile de ces sacs, il confectionna une couverture dans laquelle il enveloppa la jeune fille. Il y avait longtemps qu’il s’était défait de sa tunique de peau, pour la lui faire revêtir presque de force.

Il avait aussi ramassé une bonne brassée de mousse, qu’il avait mis sécher devant le feu. Le matin venu, il arrangea, avec cette mousse, un lit au fond du canot, y coucha Ohquouéouée et la couvrit soigneusement avec la couverture qu’il avait confectionnée la veille de la toile de ses sacs. Puis il se remit en route.

Mais il n’avançait pas vite. Un canot ne va pas aussi vite poussé par un seul aviron que s’il l’était par deux ; même si le deuxième est tenu par une femme. Et puis, il y avait les portages, assez nombreux ; à chacun il lui fallait tout transporter seul,