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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/308

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la jeune Indienne et à lui donner les soins que nécessitait son état.

Le lendemain, Roger se rendit aux Trois-Rivières où il réussit à vendre une partie de sa cargaison, ce qui lui permit de se procurer des vêtements plus chauds et une bonne couverture de laine pour son amie malade. Il voulait continuer son voyage aussitôt que possible, afin d’arriver à Québec avant que l’hiver ne se soit définitivement déclaré. Son but était, aussitôt rendu dans cette ville, de confier Ohquouéouée aux religieuses qui, tout en guérissant son corps, achèveraient de l’instruire des préceptes de la religion catholique, qu’elles lui feraient embrasser ; après quoi, il pourrait l’épouser et l’amener chez son père.

Notre aventurier ne se troublait pas de se demander si son père approuverait ou n’approuverait pas le choix qu’il faisait d’une épouse. Au dix-septième siècle, le nombre des femmes qui habitaient la colonie étant beaucoup moins élevé que celui des hommes, les parents étaient beaucoup plus difficiles quand il s’agissait de choisir un époux à leur fille que quand il s’agissait de choisir une épouse à leur fils ; et, bien que les premiers colons ne vissent ordinairement pas d’un bon œil les alliances contractées entre leurs fils et les femmes du pays, Roger n’en espérait pas moins que le père Chabroud ne ferait pas trop de difficultés pour recevoir son fils avec une femme sauvage.

Et puis, si son père lui faisait trop d’embarras quand il le verrait revenir avec une sauvagesse pour épouse, il retournerait, avec sa femme, chercher les peaux d’ours et le miel restés sur le bord de la rivière Coaticook, puis il irait vendre ces marchandises à Montréal ; et il resterait là, à vivre tranquillement