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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/31

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— Ce village n’est-il pas situé au confluent d’une autre grande rivière et de celle que vous aviez remontée ? questionna le jeune homme.

— Oui ! répondit Ohquouéouée : la rivière Matwedjiwan, d’après laquelle les Algonquins ont nommé leur village.

— Nous, les Blancs, l’appelons : Mattawin, et celle que vous avez remontée pour vous rendre là nous la nommons : Saint-Maurice, fit Roger d’un air rêveur. Puis il ajouta : Le chef de ce village ne s’appelle-t-il pas « Acaki ? »

— Oui, en effet ! répondit l’Indienne, surprise. Puis, après un silence, voyant que le jeune homme ne parlait plus, elle reprit son récit :

Les Algonquins n’avaient amené, dans leur expédition, que juste assez de femmes pour porter les bagages et préparer les aliments. Le reste de la population, composé surtout de femmes et d’enfants, était resté au village. Ils accueillirent les arrivants avec de grandes démonstrations de joie, qui se changèrent en pleurs et en lamentations quand ils apprirent les nombreuses pertes que la troupe avait subies au cours de l’expédition.

À peine étions-nous arrivés dans le village que le chef, me prenant par le bras, m’entraîna dans sa cabane. Là, un triste spectacle s’offrit à ma vue : étendu sur une couche de peaux, le visage et le corps émaciés par la maladie, les yeux brillants de fièvre, un jeune guerrier nous regardait.

Le chef, après l’avoir considéré quelques instants en silence, se tourna vers moi et dit :

« Celui qui t’as enlevée de ton village n’est plus ; il est resté dans les bois de ton pays !… Quand le