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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/313

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qu’elle devenait plus malade, et ne vivant que dans une seule pensée, un seul espoir !

Deux ou trois fois par jour, il se présentait à la porte de l’hôpital et s’informait de l’état de la jeune fille ; et, en une couple d’occasions, on lui avait permis de la voir. Alors il s’était avancé jusqu’auprès du lit où gisait la jeune Iroquoise. Puis, de l’allure impressionnée que prend un homme qui entre dans un temple d’une croyance autre que la sienne, il s’était assis sur la chaise qu’une religieuse lui avait avancée.

Quand il était assis, Ohquouéouée prenait une de ses mains dans les deux siennes, puis elle se l’appuyait sur le front pendant que des larmes silencieuses, qu’on eût dit être des larmes de bonheur, brillaient au bord de ses paupières à demi-fermées.

Roger, de son côté, ne pouvait qu’à grand peine retenir ses larmes prêtes à couler. Et ils restaient dans cette position de longs moments, ne se parlant que très peu : ils avaient tant de choses à se dire, leurs cœurs étaient si pleins, qu’ils ne pouvaient trouver de mots pour exprimer leurs pensées tumultueuses.

À voix basse et gênée, le jeune homme essayait de rassurer la malade sur son état et de lui inspirer confiance en sa guérison prochaine. Ohquouéouée l’écoutait en le regardant avec ses grands yeux noirs, maintenus brillants par la fièvre, et, le plus souvent, ne répondait pas. Quand elle parlait, c’était pour rappeler au jeune Canadien comme il avait été bon pour elle, et pour lui dire combien elle était heureuse d’avoir pu l’arracher aux tortures que lui réservaient les guerriers de son sang.