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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/318

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sèrent la bière sur des tréteaux de bois noir, devant le chœur. Un missionnaire entra par une porte à côté de l’autel, et se mit à réciter les prières des morts en langue sauvage.

Quand la cérémonie fut terminée, et que le prêtre eut aspergé le cercueil d’eau bénite, les quatre sauvages reprirent leur fardeau et, sortant de l’église, ils se dirigèrent vers le cimetière situé tout à côté.

Rendus presqu’au centre du champ des morts, à deux pas de la grande croix de bois noir, ils déposèrent le cercueil au bord de la fosse fraîchement creusée et qui paraissait impatiente d’embrasser son dépôt. Le missionnaire, qui avait suivi depuis la chapelle, récita encore quelques prières, aspergea une dernière fois la bière et la fosse d’eau bénite et se retira, pendant que les quatre Hurons descendaient les restes d’Ohquouéouée dans le trou profond, qu’ils se mirent aussitôt à remplir.

Quand ils eurent terminé leur ouvrage, ils se retirèrent à la suite de la foule qui s’était écoulée lentement pendant qu’ils travaillaient ; et il ne resta qu’une seule personne dans le petit cimetière, tout parsemé de croix de bois et entouré, sur trois de ses côtés, de hauts et noirs sapins. Ces sapins, qui paraissaient plus noirs encore par ce temps sombre, donnaient à l’enclos tout entier l’aspect d’une fosse immense.

Roger, nos lecteurs l’ont certainement reconnu dans le personnage qui a suivi le cercueil depuis son départ de l’Hôtel-Dieu, se voyant seul, s’assit, ou plutôt se laissa tomber sur un tertre voisin de celui qui venait d’être formé et, indifférent aux choses environnantes, il se mit à songer.