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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/58

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Il fit d’abord marier les deux amoureux, puis il les mit en état de se construire une habitation et de commencer les défrichements sur un lopin de terre. Ce lopin de terre était situé un peu plus bas que l’endroit où est maintenant le village de Sainte-Anne-de-Beaupré.

Étienne Chabroud ne désappointa pas son protecteur. C’était un homme parfaitement honnête, et en tous points digne d’être l’ancêtre d’une race de véritables Canadiens ; il défricha sa terre, devint le père de dix-neuf enfants, dont onze fils et huit filles, et il mourut à l’âge de quatre-vingt-douze ans, aussi respecté et aussi pauvre que quand il était arrivé à Beaupré.

De cette nombreuse famille, un seul, le huitième fils, qui se trouvait être le onzième enfant, est mêlé à ce récit. Il naquit quatorze ans après l’arrivée de son père à Beaupré et reçut, au baptême, le nom de Roger.

Sa première enfance se passa comme celle de tous les nourrissons qui survivent, malgré la manière stupide avec laquelle on les élève. Il perça ses dents, eut la rougeole et la coqueluche et guérit des deux, apprit à ramper, puis à marcher et enfin à courir et parvint, sans trop d’encombres, à l’âge de sept ans.

Mais, arrivé à cet âge, et sans cause apparente, il se mit à dépérir. Ses joues perdirent leurs brillantes couleurs et il devint pâle comme le fils d’un millionnaire moderne. Cependant il grandissait à vue d’œil. Mais au lieu d’être rond et potelé, comme il l’avait été jusque-là, il devenait maigre comme un squelette.

Sa mère essaya, pour le guérir, de tous les purgatifs connus dans la colonie à cette époque, mais