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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/61

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sauvage, et Roger n’eut, de tout l’hiver, qu’à jouer dans la neige, à parcourir, sur ses raquettes, les bois environnants et à glisser sur sa traîne.

À ce régime, il devenait, de jour en jour, de plus en plus canadien.

Sa mère, cependant, n’avait pas renoncé à l’idée de lui enseigner à lire et à écrire. Mais, cette fois, elle y alla plus prudemment. Pendant tout l’automne et l’hiver, elle profita, pour lui donner ses leçons, des jours où la température était trop inclémente pour lui permettre de sortir.

Au printemps, Roger lisait et écrivait passablement. L’automne suivant, ses parents l’envoyèrent à Québec, pour y passer l’hiver, afin de se préparer à sa première communion. Il revint, l’hiver fini, lisant et écrivant comme un notaire ; mais quatre mois de réclusion l’avaient un peu pâli. Ce fut assez pour qu’on lui rende sa liberté. L’été revenu, Roger se remit à jouer sur la grève. Il y avait toujours là quelque petite embarcation, canot ou chaloupe. Il passa l’été sur le fleuve, pêchant, se promenant et visitant les environs. À l’automne, il nageait comme un poisson, manœuvrait une embarcation, que ce fût à la voile, à la rame ou à l’aviron, comme un vieux loup de mer, et il connaissait tous les environs de Beaupré comme pas un.

L’année suivante, on lui permit de se servir d’un fusil. Cette année-là, l’hiver le prit dans les bois, chassant. L’été suivant, il reprit sa vie sur l’eau, et ainsi de suite.

Toute la famille, surtout depuis qu’il avait remplacé sa mère aux écritures — il y avait, chez Étienne Chabroud, des écritures pour occuper une