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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/65

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Quand il fut arrivé à l’endroit le plus élevé du promontoire, il appuya son fusil contre un arbre, s’assit sur la mousse et continua sa rêverie, pendant que, presqu’à son insu, ses regards erraient sur l’immensité du paysage étendu à ses pieds.

Le temps était clair et l’air pur ; et si Roger eut été moins absorbé par ses pensées, il aurait pu admirer le plus beau paysage qui soit.

À droite et en face, la vue embrassait toute la côte de Beaupré, le bras du fleuve qui sépare la côte nord de l’île d’Orléans et presque toute l’île elle-même. Puis cette partie du fleuve comprise entre l’île et la côte sud, toute la côte sud, et la vue n’était arrêtée que par la ligne bleuâtre des montagnes fermant l’horizon, dans le lointain.

À gauche, l’eau verte s’étendait aussi loin que la vue pouvait porter. Plus à gauche encore, la ligne sombre et boisée de la rive, de plusieurs centaines de pieds plus élevée, en cet endroit, que le niveau de l’eau, était coupée par une étroite et profonde vallée. Le long de cette vallée serpentait une petite rivière qui, bien que les feuilles fussent presque toutes tombées, était presque complètement cachée par les arbres. Et la rivière, en se joignant au fleuve, formait une petite baie entourée d’une grève sablonneuse.

Roger était assis sur le haut de son promontoire depuis quelques temps déjà quand, soudain, il tressaillit. Son regard qui, pendant que son esprit vagabondait, se reposait de préférence sur les flots miroitant au soleil, venait d’être arrêté par une flottille de canots qui contournaient la pointe, de l’autre côté de la baie, à sa gauche. Ces canots étaient au nombre