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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/68

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Le chef, sans détourner les yeux et sans remuer les lèvres, fit, de la tête, un signe affirmatif.

Encore quelques instants de silence, et Roger reprit :

— Vous vous rendez sans doute à Québec ?

Le chef, toujours impassible, fit, cette fois, un signe négatif. Puis, après un moment, il dit :

— Nous nous rendons dans nos cabanes, où nos femmes et nos enfants nous attendent.

Roger, toujours sous l’impression qu’il avait affaire à des sauvages des environs de Québec, revint à la charge, et de nouveau, questionna :

— Où sont-elles situées, vos cabanes ?… Est-ce à Lorette ou à Sillery ?

L’Indien fut plusieurs minutes sans répondre. Enfin, au moment où Roger, croyant ne pas avoir été entendu, allait répéter sa question, le chef dit avec hauteur :

— Nous sommes les amis des Blancs !… Nous ne sommes pas leurs esclaves !… J’ai, plusieurs fois, visité Ononthio, le grand chef des Blancs. J’ai même habité son village, une fois, pendant tout le temps que la neige couvrit la terre !… Je n’ai jamais éprouvé le désir de bâtir ma cabane sous sa protection !

— Mais où est-il donc votre village, ne put s’empêcher de demander encore une fois le jeune Canadien ?

Comme si le chef eut trouvé qu’il avait déjà trop parlé, il se contenta de faire un geste qui indiquait les montagnes derrière eux. Puis il reprit son impassibilité première.

Pendant quelques temps, le silence ne fut troublé que par les crépitements de la graisse provenant du