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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/85

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Alors le fermier rappela ses fils, en envoya une couple allumer un feu sur la grève, pour le cas où Roger serait sur le fleuve, en envoya d’autres sur une éminence située non loin de la maison, avec instruction de tirer du fusil à de courts intervalles, pour le cas où il serait dans le bois et aurait perdu sa direction, puis il revint à la maison et attendit.

La famille passa la nuit blanche, en faisant toutes sortes de conjectures. Tantôt ils pensaient que celui qu’ils cherchaient était tombé dans quelque précipice, et qu’il gisait là, blessé, appelant au secours. Tantôt ils le croyaient dévoré par les bêtes sauvages ou noyé dans le fleuve.

Tout à coup, Étienne eut une idée qui fit briller une lueur d’espoir dans leur anxiété : Roger était peut-être parti à l’improviste pour Québec, ou quelque autre endroit où il avait des connaissances ?… Mais un de ses fils, qui entrait en ce moment, lui fit comprendre que celui qu’ils cherchaient ne pouvait être parti en voyage, ni s’être attardé sur le fleuve, car aucune embarcation ne manquait à l’amarrage ; Roger ne serait pas parti pour Québec, distant d’une dizaine de lieues, à pied.

Le lendemain, aussitôt le jour venu, Étienne organisa deux escouades, chacune formée de quatre de ses fils, et les envoya fouiller les bois. Lui-même, monté dans une chaloupe, parcourut la rive du fleuve sur une couple de lieues en aval et autant en amont, sans rien découvrir. Il alla bien à l’endroit où Roger avait rencontré les sauvages, mais, depuis la veille, le flot, en montant et en se retirant, était venu effacer toutes traces de leur passage.