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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/87

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La partie de l’île où ils étaient campés était, à cette époque, couverte de chênes. Comme on était à la fin d’octobre et qu’à cette saison les fortes gelées font tomber les glands, les sauvages passèrent la journée, quand ils ne dormaient pas, à chercher des noix parmi les feuilles mortes dont le sol était couvert, et à les manger. Ces amandes remplaçaient, pour eux, la farine de maïs dont ils manquaient depuis quelques jours ; la provision dont ils s’étaient munis en partant pour leur expédition étant épuisée.

Quant à Roger, il passa la journée en compagnie du chef, qui mettait toute son adresse pour entrer plus avant dans la confiance du jeune homme, conversant, mangeant et dormant ; une partie de la nuit passée en canot à manier l’aviron l’avait fatigué et il avait besoin de repos.

Vers cinq heures de l’après midi, la mer achevant de baisser et le courant étant presque nul avant de se mettre à remonter avec le flux, Acaki donna le signal du départ. Toute la bande s’élança vers les canots et, cinq minutes plus tard, chacun maniait l’aviron de toutes ses forces.

Il leur fallut cependant ramer en silence et en évitant soigneusement de faire le moindre bruit, soit en faisant grincer l’aviron contre le côté du canot, soit en frappant la surface du fleuve avec le plat de l’aviron ou en faisant voler l’eau en l’y plongeant ou en le retirant. Il est peut-être superflu d’ajouter que chacun s’abstenait de parler, même à voix basse.

La flottille se dirigea d’abord vers la rive sud, afin de mettre la pointe de Lauzon entre eux et Québec. Car, bien qu’il fit déjà sombre, ce n’était pas encore la nuit complète. Ils continuèrent de longer la rive