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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/98

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sans relations comme il l’était, de se procurer un permis du gouverneur pour s’absenter dans la forêt pour plus de vingt-quatre heures ; ces permis étaient en nombre limité, ne se donnaient qu’à ceux qui faisaient officiellement le commerce des pelleteries, et valaient une forte somme chacun.

Le plus simple avait donc été, pour notre héros, de faire comme il avait fait et comme faisaient tous les jeunes Canadiens de l’époque qui ne pouvaient résister à l’attrait des grands bois : partir sans tambour ni trompettes et revenir quand il le pourrait.

Le troisième jour après la chasse que nous avons racontée dans le chapitre qui précède, la bande des Algonquins, accompagnée de Roger, arriva en vue de leur bourgade, qu’ils avaient quittée au milieu de l’été pour aller porter la guerre dans cette partie du Canada qu’on appelle l’Acadie.

Cette bourgade était située au confluent de la rivière Saint-Maurice et de la rivière Mattawin, que les sauvages appelaient, comme on l’a vu dans le récit d’Ohquouéouée à Roger : Matwedjiwan ; c’est-à-dire : Eau-qui-coule-en-faisant-du-bruit, et d’après laquelle ils avaient nommé leur bourgade.

Parvenue à environ un demi-mille de la bourgade, la bande atterrit et, après avoir tiré les canots sur la grève, les sauvages continuèrent leur route à pied. Quand ils eurent parcouru environ la moitié de la distance qui les séparait du village, ils s’arrêtèrent et un des guerriers, se détachant du reste de la bande, continua d’avancer seul, jusqu’à ce qu’il ne fût plus qu’à une couple de cents pas des premières cabanes.

Rendu là, il s’arrêta à son tour et, élevant la voix, il poussa un cri aigu et prolongé, qu’il répéta