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Ce matin, le temps est beau, l’air est pur, et de la croisée de ma chambre, j’aperçois mon ami M…… qui contemple avec admiration la belle vallée du lac St. Jean. Il semble vouloir en prendre possession à lui seul et se constituer le monarque de ces lieux.

Nous pensionnons chez un cultivateur à figure intelligente et honnête, M. Job Bilodeau, que le malheur a éprouvé dans le terrible incendie qui dévasta le Saguenay en 1870. Il est un des plus anciens colons du lieu et sa demeure est construite en face de l’Église paroissiale, sur une terre fertile. Il connaît son lac St. Jean par cœur, car c’est lui qui, en 1851, assista M. l’arpenteur Tremblay et avec lui chaîna le lac. Il donne à celui-ci une longueur de 44 milles et 26 milles de largeur.

À proprement parler c’est à St. Louis que commence la vallée du lac St. Jean, car à cet endroit les montagnes s’éloignent graduellement. La localité est également connue sous le nom de Pointe-aux-Trembles ; cependant sur la carte nouvellement faite sous la surveillance du département des terres, elle porte le nom passablement monarchique de St. Louis de Chambord.

J’ai vu près de chez M. Bilodeau un champ ensemencé de blé depuis 13 années consécutives, et la récolte promet encore un bon rendement ; on me dit que la moyenne est de 13 à 14 minots pour un dans cette paroisse. Si on s’obstine à semer ainsi grain sur grain contre toutes les règles de la prudence, on le regrettera plus tard amèrement.