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UNE DE PERDUE

M. Preau tenait à la main un papier soigneusement plié. Personne ne comprenait M. Préau, et chacun cherchait à lire sur sa figure, légèrement animée, si c’était encore une sanglante ironie ou un véritable témoignage d’approbation.

« Le docteur Rivard, continua monsieur Préau, peut prendre communication de ce document, ou, s’il l’aime mieux, le greffier en fera la lecture publiquement.

— Passez le papier au docteur Rivard, dit le juge.

M. Préau dit un mot à l’oreille d’André Lauriot, qui était derrière lui ; après quoi il lui remit le papier, en lui disant, à haute voix de le porter au docteur Rivard.

Le docteur s’était levé pour recevoir le document. Le public était dans une attente fiévreuse.

Le docteur Rivard lut tout le document, sans qu’un muscle de sa figure trahit ce qui se passait dans son âme ; son front ne se contracta pas, sa main ne trembla pas, son œil demeura ouvert. Son corps était droit, raide, immobile. Tous ceux qui l’entouraient éprouvaient une émotion pénible et avaient pitié de cet homme, qui avait éprouvé tant d’humiliations durant la journée. Enfin le docteur Rivard voulut parler, et il ne fit entendre qu’un cri rauque ; sa tête se pencha sur sa poitrine, et il tomba, comme s’il eût été frappé d’un coup d’apoplexie foudroyante !

Il venait de lire le mandat d’arrêt, que le juge de paix avait lancé contre lui.