Page:Bouchor - Les Poëmes de l’amour et de la mer, 1876.djvu/255

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.



Et le poète amoureux des splendeurs
En qui l’on voit s’épanouir la vie,
Aux flots, aux cieux, aux sereines grandeurs
Mêle son âme éperdue et ravie.

Et vers le ciel il lève les deux mains :
Salut ! salut ! sainte beauté physique !
Nous ignorons les sombres lendemains,
Mais roule, ô mer, ta profonde musique !

Quand verra-t-on s’éteindre le soleil,
Et quand la mer, la grande âme vivante,
Ensevelie en l’éternel sommeil,
Deviendra-t-elle un lit noir d’épouvante ?

Silencieuse épouvante des nuits,
Sans rayons d’or et sans ouragans sombres…
Quand se perdront les formes et les bruits
Dans l’océan mystérieux des ombres ?

Qui le dira, soit-il prêtre ou savant ?
Hors le soleil, tout est obscur au monde :
Mais quelque jour se lèvera le vent
Pour balayer l’existence féconde.