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Page:Bouchor - Les Symboles, nouvelle série.djvu/23

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trop évident que, malgré leur action persistante sur les esprits, ni la philosophie moderne, livrée à toutes les contradictions, ni la Révolution française, contestée dans ses principes et dans ses résultats, n’ont su créer une foi commune et envelopper toute la vie humaine à la manière des religions. Telles sont les idées que je devrais exposer dans un nouvel Épilogue ; et je terminerais par une anxieuse interrogation de l’avenir. C’est en d’autres œuvres que je tenterais d’exprimer toute croyance qui, désormais, pourrait se former en moi.

Je me donne le plaisir d’imaginer ce que serait mon livre ; mais il est douteux que je le termine. Rien de plus malaisé que de se remettre à une besogne longtemps interrompue. Or, j’ai été distrait des Symboles par une occupation très absorbante. Cinq ou six années de ma vie auront été consacrées exclusivement à un théâtre de marionnettes, pour lequel j’ai écrit une vingtaine d’actes. Ce n’est pas que j’en aie le moindre regret. Il est, du reste, évident que la pensée directrice des Symboles me hantait toujours, tandis que j’écrivais pour de naïves poupées. La religion a créé l’atmosphère de toutes mes pièces, lorsqu’elle n’en était point l’unique inspiration. Mais, tandis que je tenais le fil de mes petits acteurs, j’ai dû laisser à l’écart le gros livre inachevé. Je ne sais pas si j’aurai le courage de m’y remettre.

Peu de lecteurs, j’imagine, ont eu la complaisance de me suivre jusqu’à présent. Aussi, regardant comme des amis ceux qui l’ont fait, je ne chercherai point d’excuses pour avoir parlé de moi avec une si parfaite absence de modestie.