Page:Bouchor - Les Symboles, nouvelle série.djvu/244

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

S’exhale des Esprits légers et bienheureux ;
Et, penchés l’un vers l’autre, ils murmurent entre eux.

Ils murmurent entre eux, les deux êtres de gloire.
« O mon âme, dit l’un, contemple ces moissons !
J’entends chanter en moi de lointaines chansons ;
Terre, je te bénis. Ma pieuse mémoire
Garde le souvenir de tes plus humbles fleurs,
Où brilla la rosée amère de mes pleurs. »

En souriant répond le plus beau des deux anges :
« Le Ciel m’avait laissé de trop cuisants regrets ;
Mais j’aimais, comme toi, la mer et les forêts.
La prière des fleurs se mêlait aux louanges
Qui, plus haut que la terre et que l’espace bleu,
S’élevaient de mon cœur vers le cœur de mon Dieu. »

Les deux êtres divins soupirent sans tristesse.
« J’ai rêvé bien souvent, dit enfin le premier,
Le long du seigle mûr, à l’ombre d’un pommier,
Qu’un jour tu me rendrais tendresse pour tendresse.
Je bénissais un mal qui m’enivrait de toi ;
Dans mes yeux, tu l’as dit, resplendissait ma foi. »