Page:Boufflers - Journal inédit du second séjour au Sénégal 1786-1787.djvu/103

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petit grain d’ipécacuanha qui nous a fait tant de mal à tous les deux. Cependant notre capitaine est un homme et tu es une femme ; mais il y a entre vous deux la différence d’un gros canard de Barbarie à un petit colibri. C’est une chose à laquelle mes cinquante ans ne s’accoutument point encore que ces énormes différences dans les mêmes espèces et ces singuliers rapprochements dans des espèces différentes ; par exemple, toi, tu ressembles mille fois plus à un ange qu’à une femme ordinaire.


Ce 7. — Je presse autant que je puis le départ du vaisseau qui portera M. Blanchot et mes lettres. Mais toutes les affaires commencent par être des hydres à mille têtes et finissent par être des hydres à mille queues ; en sorte que ce qui semblait devoir être fait dans deux jours en exige peut-être huit. Mais on m’annonce en ce moment un bâtiment qui doit mouiller dans une demi-heure ; d’après tous les rapports ce doit être la Duchesse de Lauzun et elle doit m’apporter de tes lettres ; ne sois donc pas jalouse si je te quitte pour elle.


Ce 8. — Oui, mon enfant, c’était elle et j’ai un bon gros paquet que je ne donnerais pas pour son pesant de diamant. J’ai déjà tout lu, mais point encore tout relu, et ce serait les lettres d’une autre à un autre que je les lirais encore, tant je les trouve charmantes. Tu ne sais pas et moi-même je ne sais pas ce que tu vaux, mais je prends sans compter.


Ce 9. — J’ai eu une fausse joie : on a débarqué une grande caisse de plusieurs effets ou meubles et dans cette caisse il y en avait une autre fort plate,