Page:Boufflers - Journal inédit du second séjour au Sénégal 1786-1787.djvu/18

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qu’il t’aime au moment où tu lis sa lettre et qu’il t’aimera jusqu’au dernier soupir.


Ce 26. — Nous sommes en route pour Madère, où je compte relâcher pendant deux ou trois jours ; le vent est excellent, la mer est un peu dure ; mais je supporte tout avec patience et même avec facilité. Croirais-tu que je n’ai pas eu d’accès de violences depuis mon départ ? Ce n’est pas que je n’aie essuyé tout ce qu’il peut venir de contradiction dans l’espace d’un mois ; mais j’ai enfin reconnu qu’on était moins fatigué en se tenant plus tranquille ; et l’adversité, cette amie sévère de l’homme, est enfin venue à bout de me corriger. En attendant, le temps passe ; les mois s’écoulant diminuent le volume de l’année ; l’année enfin s’écoulera aussi, et il sera question de retour. C’est alors que je supplie l’adversité de suspendre pour quelque temps ses utiles leçons. Qu’il ne soit plus question alors d’amie sévère ; c’est ma douce amie que je veux revoir, et à qui je veux être tout entier. Adieu. Je t’embrasse de bien loin ; mais avec tant de délices, que c’est comme si c’était de bien près.


Ce 27. — Je n’ai qu’un pauvre petit bout de papier à barbouiller en ton honneur, mais enfin il est assez grand pour te dire que je t’aime. Nous serons, selon toute apparence, le premier de l’an à Madère. C’est de là que mes lettres partiront, et je commencerai à me servir de ton papier timbré. Adieu ; je t’embrasse comme si tu étais dans ma petite chambre ; penses-y bien.


Ce 28. — Voici le calme qui succède à la tempête,