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PRÉFACE

grès même de la science : mais plus précieuses encore pour le progrès de l’action.

Non que l’organisation des connaissances nous paraisse la condition suffisante de la vie morale. Pour qu’un idéal jaillisse du rapprochement des idées, il y faut sans doute la présence de certains sentiments, qui cèdent de leur chaleur à la combinaison. Il n’en est pas moins vrai que notre conception de l’idéal est étroitement ordonnée à notre représentation de la réalité. Ce que l’homme sait ou croit savoir, déterminant ce qui lui paraît nécessaire et ce qui lui paraît possible, délimite aussi la carrière de son désir. La qualité des « jugements de réalité » qui remplissent l’esprit d’un homme pèsera donc, directement ou indirectement, sur les « jugements de valeur » qui commanderont à sa conscience. Substituer dans cet esprit, aux résultats invérifiés d’une expérience fragmentaire, les résultats critiqués d’une expérience universalisée, c’est élargir en même temps que c’est éclairer son champ d’action ; c’est arracher quelque chose au hasard ; c’est rendre possible une détermination plus consciente et plus rationnelle.

Ainsi, en concentrant dès leur apparition les rayons de vérité émis par les sciences sociales diverses, la philosophie sociale pourra projeter utilement un faisceau de lumière, non pas seulement sur les chemins de la science, mais encore et surtout sur les chemins de l’action.

Comment dès lors la philosophie sociale ne serait-elle pas utile, en particulier, à ceux qui doivent former la jeunesse ?