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PRÉFACE

Et d’abord — pour commencer par les services les plus palpables et comme les plus matériels — la philosophie sociale augmentera leur bagage de « fiches » de renseignements, de documents de toutes sortes concernant les faits sociaux. Est-il besoin de démontrer qu’il n’est peut-être pas de cours où des informations de ce genre ne puissent être, à l’occasion, heureusement utilisées ? Mais il en est un surtout, et peut-être le plus important, où elles pourront fournir l’appoint le plus précieux.

Je songe à l’enseignement de la morale. Beaucoup d’entre nous ont à l’enseigner, non pas seulement occasionnellement, mais ex professo, non pas seulement par une réprimande ou un éloge, une lecture ou une conversation, mais par un cours proprement dit. Presque tous les réformateurs de nos programmes ont paru fonder de grands espoirs sur la multiplication de ces sortes de cours. Mais nous savons aussi par expérience — expérience de professeurs et expérience d’élèves — combien ces sortes de cours sont difficiles à soutenir. De l’aveu commun, l’enseignement direct de la morale est encore loin d’être la partie la plus intéressante et comme la plus vivante de l’enseignement.

Or ne serait-ce pas une bonne méthode, pour vivifier cet enseignement, que de l’imprégner de sociologie ? Dans la première leçon de son cours sur la sociologie de la famille, M. Durkheim le faisait justement observer[1] : « Voulez-vous que la morale n’intéresse pas moins vos élèves que la psychologie ? Nourrissez votre enseignement de faits. Ne vous contentez pas d’agiter leur esprit en

  1. Annales de la Faculté de Bordeaux. 1888, p.275