Page:Bouhélier - L’Hiver en méditation, 1896.djvu/100

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répandiez le fleuve de vos larmes, dans le temps qu’ils vont succomber, considérez-les ainsi que vous-même. Au creux de l’éblouissant sépulcre, avec leur cadavre qui répugne, le fossoyeur vous ensevelit. Car ils ont possédé l’insufflation des races, ils surent le secret de votre intention, les craintes, les tremblements du monde ; ils ont palpité pour Dieu et le bourg. — Fanny, Eglé et Eucharis imitent, dans leurs danses consacrées, bien plus que la cadence des mers, le rythme amolli de leurs strophes. — Ils vous ressemblent magnifiquement. Leur rouge sang s’engouffre au flanc des statues. Ce sont les amants véritables et les rois, les bergers réels.

Il faut les chérir avec grâce, avec véhémence et avec fureur. Cette tragique entreprise de dominer le temps que forment nos esprits ambitieux, ces hommes fameux la réalisent. En effet, ils nous pétrifient. La flamme des espèces les anime. Ils en prennent les scintillations. Dans d’épais blocs de pierre profonde, ils pétrissent les formes éternelles de l’homme et précisément leur -contemplation nous tourmente du pire désespoir, car nous éprouvons davantage la fragilité de"*notre ètre> ,devant le miracle de sa permanence.

Afin de dissiper cette lugubre obsession il n’est rien, hélas ! que vous ne tentiez. Vous honorez les beaux héros de qui les hymnes ou les exploits dotent d’éternité une minute humaine. Aux fraîches amoureuses de la route vous préférez d’antiques déesses, une nymphe ou une bergèredes immortelles églogues. Vousimaginez des parades desquelles l’extravagance satisfait vos songeries. Comme vous désiriez méditer au sujet des grêles, , de la pluie, de l’ombre ou de l’eau, ou des marguerites,